La scoliose idiopathique est une déformation tridimensionnelle de la colonne vertébrale dont un des traitements pour les cas les plus sévères et évolutifs est la chirurgie d'instrumentation et ostéosynthèse. Les objectifs de la chirurgie sont de corriger les déformations scoliotiques et de stabiliser ces corrections afin de promouvoir la fusion osseuse du segment instrumenté du rachis. La chirurgie par abord postérieur nécessite le positionnement d'une instrumentation rigide composée d'une tige et de plusieurs implants, vis ou crochets. Chaque chirurgien possède une stratégie propre quant au placement des implants ou encore à la séquence d'attachement de la tige. Un objectif à long terme serait d'offrir au chirurgien un outil numérique de prédiction de la correction apportée au rachis scoliotique à travers différentes stratégies chirurgicales.
Plusieurs modèles éléments finis et multi-corps ont déjà été proposés afin de simuler la chirurgie de la scoliose. Dans ces modèles, on a particulièrement porté attention à la modélisation de la liaison intervertébrale qui tient compte des propriétés mécaniques du disque intervertébral et des ligaments. Deux représentations de la liaison intervertébrale (de type «poutre » et « sphérique ») par l'approche multi-corps ont déjà été proposées; cependant une de leurs limites concerne leur capacité à bien rendre compte des mouvements physiologiques d'une vertèbre par rapport à une autre. En outre, les efforts qu'induisent ces liaisons lors de la simulation de la chirurgie sont assez élevés. Il est de plus important de considérer les propriétés mécaniques de cette liaison qui sont spécifiques à chaque patient. Par ailleurs, les liaisons implants/vertèbres des modèles multi-corps sont généralement représentés par des liens cinématiques parfaits, n'autorisant pas de flexibilité qui est pourtant présente en réalité. Ceci se traduit par des efforts importants lors des simulations de chirurgie.
Le but de ce travail de maîtrise était d'améliorer la modélisation de la liaison intervertébrale et du complexe implant/vertèbre d'un modèle existant afin de rendre les simulations d'intervention chirurgicale pour le traitement de la scoliose encore plus réalistes. La première hypothèse qui a été testée dans ce projet était que le résultat de la chirurgie dépend fortement des propriétés mécaniques du rachis scoliotique numérique. Et enfin la seconde hypothèse était que la liaison entre l'implant et la vertèbre influe significativement sur le résultat de la chirurgie.
Les objectifs spécifiques du projet étaient au nombre de trois:
Dans cette étude, un joint de type « field » correspondant à un ressort 3D généralisé a fait office de nouvelle liaison intervertébrale. Les propriétés mécaniques génériques initiales de ce joint ont été tirées d'études expérimentales publiées (Panjabi, 1976). Les chirurgies d'instrumentation Colorado 2 de 7 patients ont été simulées en 3 étapes: l'attachement de la tige, la rotation de la tige et le serrage des écrous. L'effet du joint « field » sur les résultats de la chirurgie a été étudié et comparé à deux autres modélisations de joints utilisées précédemment : de types « poutre » et « sphérique ». Par rapport aux deux autres joints, le joint de type « field » induit des corrections géométriques satisfaisantes dont les différences d'adéquation maximales sont de 4.6 mm en moyenne sur la position des corps vertébraux toutes directions confondues, et de 3.7 degrés sur les angles de Ferguson, alors que les efforts induits par les manœuvres chirurgicales sont en moyenne inférieurs à ceux induits par les autres joints. Ces résultats satisfaisant s'expliquent par le fait que les degrés de libertés principaux du mouvement intervertébral sont mieux pris en compte.
La procédure de personnalisation a consisté à définir une fonction objectif qui mesurait l'adéquation du modèle avec le rachis instrumenté du patient en fonction des propriétés mécaniques des joints intervertébraux du rachis numérique. La recherche des propriétés mécaniques les plus satisfaisantes a été faite à l'aide des techniques de krigeage et d'un algorithme génétique. On en a déduit une classification de la rigidité des segments rachidiens. Les corrections géométriques étaient en moyenne améliorées dans le plan frontal. Les efforts étaient par contre supérieurs à ceux trouvés avec la liaison de type « field » non personnalisée. La personnalisation uniquement dans un plan et sur un nombre de segments limités était sûrement à l'origine du manque d'adéquation restant avec la réalité.
La modélisation de la liaison implant/vertèbre a été réalisée en deux étapes : une étude expérimentale permettant de caractériser et spécifier les rigidités entre l'implant et la vertèbre et la modélisation de la liaison. Une liaison flexible a été introduite en ajoutant un joint « field » entre l'implant et la vertèbre. Cette liaison « flexible » a entraîné une différence d'adéquation moyenne de 2 mm avec le rachis instrumenté. Cependant, l'énergie ainsi emmagasinée dans la déformation des joints a réduit en moyenne de 200 N les efforts des manœuvres chirurgicales par rapport aux simulations de chirurgies avec liaison implant/vertèbre « rigide ».
En ce qui concerne la première hypothèse du projet, on a pu constater que les propriétés mécaniques de la liaison intervertébrale n'influent pas vraiment sur les corrections de la simulation de chirurgie. Cependant, elles influent grandement sur les efforts induits par la chirurgie. La seconde hypothèse est vérifiée, puisque l'on a montré que l'introduction d'une liaison implant/vertèbre a de l'influence sur les corrections et les efforts de la chirurgie. Par rapport aux objectifs, les différentes étapes de ce projet ont montré l'intérêt de définir correctement les liaisons intervertébrales en mécanique numérique du rachis. On a aussi montré que le réalisme d'une simulation de chirurgie ne résidait pas que dans les propriétés mécaniques du rachis. Ce projet a contribué au développement d'un simulateur de chirurgie pour assister le chirurgien dans l'évaluation des stratégies pré opératoires.
Idiopathic scoliosis is a 3D deformation of the spine. One of the treatments for the most severe and progressive cases is surgery with instrumentation and osteosynthesis. The aims of surgery are to correct scoliotic deformations and to stabilize them in order to promote bone fusion of the instrumented segment. Posterior surgery involves the positioning of a stiff instrumentation composed of a rod and several implants, screws or hooks. Each surgeon has their own strategy for the implants location or the sequence of attachment of the rod. A long term objective would be to offer to the surgeon a numeric tool in order to predict correction brought to scoliotic spine through several surgery strategies.
Several finite element and multi body models have already been proposed in order to simulate scoliosis surgery. In these models, the focus was to model the intervertebral link that takes into account the mechanical properties and the ligaments. Two representations of the intervertebral link (the "beam" and the "spherical" representations) in multi body representation have already been proposed, however they are limited in exactly representing physiologic movements of the vertebra to another one. Moreover, the forces produced by these two links during a surgery simulation are quite high. It is important too to consider mechanical properties of this link that are specific to each patient. In addition, implant/vertebra links of multi body models were so far represented by perfect cinematic joints, forbidding all flexibilities that are actually present in reality. This lead to important forces during surgery simulations.
The aim of this master thesis was to improve the modeling of the intervertebral link and the implant/vertebra complex of an existing model in order to increase the realism of surgery simulations for the treatment of scoliosis. The first hypothesis addressed in this project was that the result of surgery is highly dependant of mechanical properties of the numerical scoliotic spine. The second hypothesis was that le link between the vertebra and the implant influences significantly the surgery result. There were 3 specific aims:
A « field » joint representing for a generalized 3D spring is used in order to model a new intervertebral joint. Generic mechanical properties of this link have been extracted from experimental published studies (Panjabi, 1976). Surgeries of 7 patients have been simulated. The effect of 3 different joints ("beam", "spherical" and "field" joints) have been studied on the result of surgery. The use of the "field" joint provided satisfying geometrical correction (maximum average error of 4.6 mm on the 3D position of the vertebra bodies, and an 3.7 degrees average difference of the Ferguson angles). The forces and torques inducted by surgery maneuvers are in average less than those inducted by the two other joints. These satisfying results can be explained by the capacity of the "field" joint to reflect more the coupling effects of the intervertebral joint.
The personalization procedure consists in the definition of an objective function that measures the adequacy of the model with the real surgery in function of the mechanical properties of the intervertebral joint of the numerical spine. The research of the better mechanical properties are made with the use of kriging and genetic algorithms techniques. We can deduce a classification of spine segmental stiffness and compare it to Petit's one. Geometrical corrections are improved 0.5 mm on average in the 3 directions. However, forces and torques inducted by surgery maneuvers are superior to those found with the generic joint. The use of data in the coronal plane only and of a small number of stiffness segments are certainly the cause of the increasing of reaction forces.
The introduction of an implant/vertebra link in our simulations decreases the adequation of the geometrical correction of 2 mm on average in all directions but increases the realism of reaction forces due to surgical maneuvers. The energy absorbed by the joint decreases the forces and torques. A diminution up to 200N was observed when comparing the simulations to a rigid implant/vertebra joint.
Concerning the first hypothesis of the master thesis, the mechanical properties of the intervertebral link do not influence significantly the correction of the spine. However, they highly influence the forces inducted by the surgery. The second hypothesis is verified since the introduction of a link between the vertebra and the implant influences the corrections and the forces induced by the surgery. The different steps of the project have shown the importance of defining correctly the intervertebral links. These results lead to the development of a spine surgery simulator to assist the surgeon in evaluating pre operative strategies.