Cette thèse est une contribution à l’amélioration de la connaissance des comportements mécaniques des tissus biologiques, en particulier dans le contexte accidentologique. L’objectif de cette étude biomécanique est de faire le lien entre les notions de lésions utilisées en clinique et celles d’endommagement et de rupture utilisées en mécanique. Elle porte sur la modélisation du comportement des ligaments dans l’articulation du genou humain, et s’intéresse plus particulièrement à l’insertion du ligament dans l’os. Les lésions qui touchent cette structure se produisent soit dans le ligament, soit dans une région proche de la zone de transition entre l’os et le ligament. Ce problème est original sur les plans anatomique et mécanique. Sur le plan anatomique, il n’existe pas de description fine (c’est-à-dire à l’échelle microscopique) de l’architecture de cette transition, qui paraˆıt brutale à l’œil nu et qui est un lieu possible de lésion ligamentaire. Sur le plan mécanique, il s’agit de l’étude d’un tissu biologique, qui comprend de plus la transition entre un tissu dur minéralisé (l’os) et un tissu mou non minéralisé à fibres longues (le ligament). La méthodologie a donc été de comprendre le fonctionnement de l’articulation du genou et les lésions et traumatismes dont elle est le lieu, de connaˆıtre la composition et l’organisation des tissus qui constituent cette transition, au moyen d’un étude histologique, de décrire son comportement mécanique dans le fonctionnement du ligament, par le développement d’un protocole expérimental, et enfin de développer un modèle de comportement de l’insertion ligamentaire. L’étude porte sur les ligaments croisé postérieur et latéral externe, ligaments dont les mécanismes lésionnels dans le cas des accidents de la route ont été plus particulièrement étudiés.
L’architecture de la zone de transition en microscopies optique et électronique a été décrite et a montré qu’elle est la superposition d’un front de minéralisation et d’un changement de la structure du tissu (présence de cartilage fibreux). Cette transition se fait sur une longueur d’environ 300 µm. Les essais expérimentaux de traction ont été réalisés sur la structure insertion ligamentaire - ligament - insertion ligamentaire prélevée sur sujets d’anatomie. La sollicitation a été appliquée soit dans la direction des fibres ligamentaires, soit une direction réaliste du point de vue physiologique. Les protocoles développés permettent de faire des essais cycliques sans endommager les tissus et des essais à rupture sous sollicitations quasi-statiques (1 mm/s et 20 mm/s) et dynamiques (0.5 m/s et 1 m/s). Pour les essais dans la configuration physiologique, les genoux ont été testés en extension complète (station érigée) et à 120˚ de flexion (position de conduite). Les résultats expérimentaux montrent que, pour les vitesses et amplitudes testées, les ligaments dissipent de l’énergie par frottement interne et que leur comportement est très dépendant de l’angle de flexion du genou. La rupture se produit toujours par arrachement osseux au niveau de l’os cortical en quasi-statique. En dynamique, pour la vitesse testée, il y a toujours décohésion entre fibres dans le ligament, mais la rupture se produit le plus souvent par arrachement de l’os spongieux en profondeur. L’étude du comportement du ligament (influence de l’orientation de l’insertion ligamentaire) et de la micro-structure de l’insertion nous ont menés à choisir un modèle d’interface pour décrire son comportement. Deux modèles de zones cohésives (couplant frottement, adhésion et éventuellement endommagement) ont été développés pour prédire les lésions par arrachement osseux et par décohésion entre les fibres ligamentaires.
This PhD thesis is devoted to the improvement of the knowledge of the soft tissues mechanical behaviour, particularly in the field of accidentology. This study aims at linking the concepts of injury used for clinical diagnostic and these of damage and failure used in mechanics. It deals with the modeling of the ligaments behaviour in the knee joint, and the role played by ligament-to-bone insertion in particular. This structure, composed of the ligament and the insertion sites, is injured either in the ligament itself (in the midsubstance) or near the ligament-to-bone transition. This problem is original according to anatomical and mechanical points of view. Anatomically there is no precise description at the microscopic level of the architecture of this transition, that seems to be very sharp at the macroscopic level, whereas it is a possible place of injury. Mechanically, it is the study of a biological tissue that is besides the transition from a mineralised hard tissue (the bone) to a non mineralised soft tissue composed of long fibres (the ligament). The methodology developed here was : understanding how the knee joint works and which injuries and traumatims occur in this joint, determining what the transition is composed of and how its components are organised, by performing a histological study, describing its mechanical behaviour and its contribution to the global behaviour of the knee, by developing an experimental protocol, and, lastly, developing a model of the mechanical behaviour of the ligamentto-bone transition. This study is devoted to the posterior cruciate and lateral collateral ligaments, the injury mechanisms of which, in the case of road accidents, were more specifically studied.
The architecture of the ligament-to-bone transition was described thanks to light and electron microscopies : it is the superimposition of a mineralisation front and structural changes in the tissue (there is fibrocartilage). This transition is about 300 µm long. The experimental tensile tests were performed on the ligament insertion – ligament – ligament insertion structure cut off from post mortem human subjects (PMHS). The structure was subjected to tensile load, either along the fiber direction, or in a realistic direction according to anatomical considerations (physiological configuration). The protocols developed in this thesis enable to perform non destructive cyclic tests, and failure tests, under quasi – static (1 mm/s and 20 mm/s) and dynamic (0.5 m/s and 1 m/s) loadings. For the physiological configuration, knees were tested with an angle of knee flexion of 180˚ (standing position) and 120˚ (driving position). The experimental results show that the ligaments dissipate energy during cyclic loading because of internal friction, and that their behaviours highly depend on the angle of knee flexion, at least in the loading range tested. Under quasi – static conditions, failure always occurs by avulsion in the cortical bone. Under dynamic conditions, in the loading range tested, there is firstly loss of cohesiveness between ligament fibres, but failure occurs most often because of deep alvusion of trabecular bone. Considering that the ligament mechanical behaviour depends on the orientation of the insertion sites, and knowing the microstructure of the insertion site, we chose an interface model to describe its behaviour. Two models of cohesive zones (coupling friction, adhesiveness, and damage) were developed to predict ligament injuries due to bone avulsion and loss of cohesiveness between ligament fibres.