Les activités de la vie quotidienne comme la marche et la montée d'escaliers imposent des charges et des mouvements relativement importants sur l'articulation du genou humain. Cette charge mécanique augmente dans de nombreuses tâches professionnelles et récréatives entraînant des blessures et des dégénérescences dans les ligaments, les ménisques, le cartilage et l’os. Toute faiblesse ou modification par rapport à la structure native qui conduit à la dégénérescence dans l'un de ces composants influencent la réponse de l'ensemble du joint et augmente le risque d'autres perturbations. Les gestions efficaces, non-opératoires et post-opératoires des désordres affectant le joint du genou humain exigent une bonne connaissance des distributions des contraintes et des déformations dans les différentes composantes constituant le joint, dans les situations intacte et altérée. Ces valeurs, à leur tour, dépendent fortement non seulement des charges extérieures et des forces d’inertie, mais aussi des activités musculaires à travers le joint. De ce fait la précision dans l'estimation des forces musculaires a une incidence directe sur la fiabilité des contraintes et des déformations prédites dans le joint. Les mesures directes in vivo des contraintes tissulaires et des forces musculaires restent invasives. Par contre la modélisation numérique est reconnue comme un outil complémentaire indispensable pour estimer plusieurs variables d’intérêt. Ainsi, les difficultés techniques rencontrées dans les mesures de mouvements et la considération plus réaliste des charges physiologiques rendent les tests in vitro également limités surtout quand on regarde des variables internes comme les contraintes et les déformations dans les ligaments et le cartilage.
Pour atteindre ces objectifs, un modèle éléments finis itératif, contrôlé par les données cinématique et cinétique collectées durant la marche humaine, qui tient compte des structures passives du joint du genou et l’ensemble de la musculature active de l'extrémité inférieure a été utilisé. Dans ce modèle les articulations de la hanche et de la cheville ont été considérées comme des joints rigides simplement sphériques (3D pour la hanche et 2D pour la cheville), alors que l’articulation de genou est représentée sous la forme d'un modèle déformable d’éléments finis non linéaire. Les cartilages et les ménisques constituant le joint ont été modélisés comme des structures composites formées d’une matrice hyper-élastique renforcée par des réseaux nonhomogènes de fibre de collagène avec des propriétés mécanique non linéaires. Les ligaments présentant des propriétés non linéaires et des déformations initiales distinctes. Des mesures cinématique et cinétique in vivo collectées chez des sujets asymptomatiques et des sujets atteints de l’ostéoarthrite sévère du genou, pendant la phase d'appui sont utilisées pour modéliser séparément les deux groupes. Les analyses sont effectuées pour six instances de temps correspondant au début 0% (initiation de la phase de réception), 5%, 25%, 50%, 75% et 100% (fin de la phase de propulsion), de la phase d'appui. L’estimation des forces musculaires passe par une technique d’optimisation en résolvant les équations d’équilibre obtenues à chaque niveau de la phase d’appui. Le minimum de la somme des contraintes musculaires élevée à la puissance 3, a été considéré comme la fonction objectif dans le problème d’optimisation. Des contraintes d’inégalités obligeant les contraintes musculaires à demeurer supérieures aux contraintes passives et inférieures aux contraintes maximales, complètent le problème d’optimisation. La réponse de l’articulation du genou est ensuite analysée par la réactualisation des forces musculaires qui équilibrent le moment induit par les forces de poids et de réaction du pied, ceci va faire tendre ce moment, au niveau du joint, vers zéro, après un nombre d’itérations bien défini. Notre investigation initiale s’est concentrée sur la réponse du joint du genou humain dans le cas de la marche à cadence normale sur des sujets sains et l’effet de la modélisation globale et locale du membre inferieur. Ensuite, les mêmes étapes d’analyse ont été considérées pour étudier l’effet de l’ostéoarthrite sévère sur les réponses active et passive du joint du genou. Un volet consiste à étudier la réponse du genou à 50% de la phase d’appui sous l’effet d’un changement de rotation et de moment dans le plan frontal. Cette dernière servira, à minimiser la charge supportée par le plateau tibial médial durant la phase d’appui lors de la marche. À noter que cette approche est originale et elle est très peu présente dans la littérature. Finalement, les contradictions rapportées et le faible nombre d’études dans la littérature, ont motivé notre intérêt pour l’étude de la relation entre le muscle gastrocnemius et le ligament croisé antérieur (LCA) durant la marche et durant une contraction isolée de ce muscle sur le joint tibiofemoral en flexion.
Avec la technique d'optimisation locale, un modèle où on néglige les équations d’équilibre de la hanche, une prédiction remarquable a été obtenue pour les modifications subies par les forces musculaires et la réponse passive du joint du genou durant la phase d’appui. Ces prédictions concordent avec les résultats des études antérieures sur la marche humaine. Effectuer les analyses sur 6 périodes du début à la fin de la phase d’appui (0%, 5%, 25%, 50%, 75% et 100%) montre une activité maximale de trois groupes musculaires principaux entourant le joint à 5% pour les muscles du Ischio-jambiers, à 25% pour le quadriceps et à 75% pour le muscle jumeau. Le ligament croisé antérieur a atteint son maximum de 343 N à 25% de la phase d’appui, et cette valeur a diminué par la suite. Les forces de contact atteignent leurs maximums de 1908 N, 2467 N et 2238 N à 5%, 25% et 75% de la phase d’appui, respectivement, où la majorité de la charge passe à travers le compartiment médial causant une déformation et une concentration de contraintes plus importante par rapport au compartiment latéral. Les valeurs maximales de pression de contact sont égales à 8.1 MPa et 7.5 MPa à 25% et 75% de la phase d’appui, respectivement. Cependant, l'inclusion de l’équilibre de l’articulation de la hanche dans l'optimisation, le long des articulations du genou et de la cheville, a légèrement influencé les réponses musculaires globales autour de l’articulation du genou (< 10%). En conséquence, les différences sont encore plus petites entre les forces ligamentaires, les forces de contact, et les contraintes/déformations du cartilage au cours de la phase d'appui durant la marche. Par contre, la répartition des forces totales entre les composantes musculaires uni-et bi-articulaires dans les quadriceps et les Ischio-jambiers, s’est considérablement altérée durant la phase d’appui pour assurer un équilibre simultané des deux articulations (hanche et genou).
En ce qui concerne la comparaison entre les patients atteints de l’ostéoarthrite sévère du genou par rapport aux sujets normaux, les forces musculaires ont peu baissé à toutes les périodes sauf à 50% de la phase d’appui et ceci en accord général avec les travaux antérieurs. La force dans le ligament croisé antérieur est restée presque inchangée. Les forces et les contraintes de contact diminuent en moyenne d'environ 25%. Les modifications des propriétés des matériaux dues à l’ostéoarthrite ont eu un effet négligeable sur les forces musculaires, mais ont augmenté les aires de contact et les déformations du cartilage; entrainant une diminution des pressions de contact maximale et moyenne. Par exemple, la pression moyenne tibiofemoral diminue à 5% de la phase d’appui de 2.5 MPa à 1.3 MPa après la diminution de la rigidité des cartilages et des ménisques. Les réductions des contraintes moyenne et maximale du contact ainsi que l'augmentation des déformations des tissus cartilagineux et le transfert de charge via les ménisques sont partiellement dues aux changements cinétique-cinématique de la marche et aux détériorations des propriétés matérielles du cartilage chez le sujet atteint de l’ostéoarthrite sévère.
L’altération de la rotation du joint du genou dans le plan frontal de ±1.5° ou le moment d’adduction de ±50% par rapport à son état de référence (1.6° et 17 Nm) à 50% de la phase d’appui influencent considérablement la réponse biomécanique du joint. La diminution de l’angle d’adduction de 1.5° augmente considérablement les forces sur le quadriceps et les Ischio- jambiers de 30 N et 110 N, respectivement. Par contre une diminution de l’angle d’adduction a fait diminuer les forces dans les muscles ci-mentionnés dans presque les mêmes proportions. Ces forces musculaires suivent de près la tendance de la variation du moment d’adduction. Les forces de contact tibial sont restées plus grandes toujours sur le plateau médial. Le rapport des forces de contact entre les deux plateaux, médial et latéral, a été considérablement altéré avec le changement de l’angle d’adduction. En effet ce rapport augmente grandement de 8.8 à 90 avec l’augmentation de l’angle d’adduction et diminue de 8.8 à 1.6 quand cet angle diminue. La variation du moment d’adduction a faiblement altéré le rapport des forces entre les deux plateaux d’un écart inférieur à 1. En conséquence, si l'objectif est de diminuer la force de contact interne, indépendamment de la charge latérale, une baisse de la rotation de l'adduction est beaucoup plus efficace qu’une réduction du moment d'adduction. L’altération de la résistance passive non linéaire du joint du genou, provoquée par le changement de l’angle d’adduction, peut expliquer la variation du comportement biomécanique du joint du genou. Ces résultats expliquent la faible corrélation entre le moment d'adduction et le chargement du compartiment médial lors de la marche et ceci suggère que la répartition de la charge interne est dictée par la rotation d'adduction du joint du genou.
Les altérations de l’activité du muscle jumeau à la fin de la phase d’appui de -36% ou de +26% influencent nettement les forces des muscles du Ischio-jambiers. Le muscle jumeau agit comme une composante antagoniste au ligament croisé antérieur en augmentant sensiblement sa force de 271 à 331 N. Nos simulations sous contraction isolée du muscle jumeau ont confirmé ces résultats pour tous les angles de flexion. En particulier, la force du ligament croisé antérieur a augmenté notablement avec l’augmentation des forces du muscle jumeau même à des angles de flexion très élevés. Une tendance qui n'était pas présente, même dans l'activité des quadriceps reconnue également comme un antagoniste du ligament croisé antérieur. Les muscles Ischio-jambiers et le muscle jumeau sont deux fléchisseurs de l’articulation du genou et jouent des rôles opposés soit respectivement la protection et le chargement du ligament croisé antérieur. De l’autre côté, le fait de savoir que le muscle jumeau est un antagoniste du ligament croisé antérieur doit contribuer à la prévention efficace des blessures post-opératoires, durant la réhabilitation après une reconstruction de ce ligament.
Un nouveau modèle d’éléments finis itératif contrôlé par des données expérimentales cinématiques et qui tient compte de la synergie entre les structures passives et la musculature active de l'articulation du genou a été utilisée pour la première fois pour déterminer les forces musculaires, les contraintes et les déformations tissulaires simultanément au cours de la marche. Nos analyses transitoires sont validées par le faible temps d’exécutions des activités quotidiennes comme la marche. Les prédictions sur la cinématique articulaire, les forces ligamentaires et les forces et pressions de contact concordent avec les résultats rapportés dans la littérature. Les prévisions actuelles ont des implications importantes dans l'évaluation et le traitement appropriés des troubles de l'articulation du genou afin d'éviter non seulement d'autres blessures mais aussi de retrouver un fonctionnement proche de la normale pour l'ensemble du joint.
Activities of daily living such as walking and stair climbing impose relatively large loads and movements on the human knee joint. This mechanical burden increases in many occupational and recreational tasks causing injuries and degenerations in joint ligaments, menisci, cartilage and bone. Any failure, degeneration or alteration in one of these components influences the response of the entire joint and likely increases the risk of further perturbations. Effective preventive and conservative/surgical managements of joint disorders depend hence on a sound knowledge of stress and strain distributions in various components under both intact and altered conditions. These values, in turn, are heavily dependent not only on external loads and inertial forces but on muscle activities across the joint. As such, accuracy in estimation of muscle forces has a direct bearing on the reliability of stresses and strains. Since direct in vivo measurements of tissue stresses and muscle forces remain invasive, computational modeling is recognized as a vital complementary tool to estimate multiple variables of interest. Due to technical difficulties in measurements and consideration of physiological loads and motions, in vitro testing is also limited especially when looking for cartilage/meniscus stresses/strains and ligament forces.
Towards these objectives, an iterative kinematics-driven FE model that accounts for the passive structures of the knee joint and active musculature of the lower extremity is employed. This model incorporates the hip as 3D and the ankle as 2D spherical joints whereas the knee is represented as a complex FE model with nonlinear depth-dependent fibril-reinforced cartilage and menisci, ligaments with distinct nonlinear properties and initial strains, patellofemoral and tibiofemoral joints. Based on reported in vivo measurements, hip/knee/ankle joint rotations/moments and ground reaction forces at foot during the gait stance phase collected in asymptomatic subjects and subjects with severe knee OA are used to separately model both groups. Analyses are performed at 6 time instances corresponding to beginning 0% (heel strike), 5%, 25%, 50%, 75% and 100% (toe off) of the stance phase. At each stance period, muscle forces at the hip, knee and ankle are predicted using static optimization (sum of cubed muscle stresses) with moment equations as constraints (3 at knee, 3 at hip, and 1 at ankle). The Knee joint response is subsequently analyzed with updated muscle forces as external loads and iterations at deformed configurations continue till convergence is reached. The relative effects of the consideration of moment equations at the hip joint alongside those at the knee and ankle joints on estimated knee joint muscle forces as well as contact forces and internal stresses in ligaments, cartilage layers, and menisci during the stance phase of gait in asymptomatic subjects were investigated. Apart from changes in input kinematics/kinetics, the OA model accounted also for likely alterations in material properties associated with the disease. The validity of certain reported strategies used in vivo to decrease the loading in the medial plateau during stance phase of gait by reducing knee adduction moment were also tested and compared with altered knee adduction angle. Finally, the effect of changes in the gastrocnemius activations, during gait and isolated contraction with free flexion, on the knee joint biomechanics and especially anterior cruciate ligament loading was also studied.
With local optimization, where moment equilibrium equations at the hip joint are neglected, predictions confirm that muscle forces and joint response alter substantially during the stance phase. Predictions are in general agreement with results of earlier studies. Performing the analyses at 6 periods from beginning to the end (0%, 5%, 25%, 50%, 75% and 100%), hamstrings forces peaked at 5%, quadriceps forces at 25% whereas gastrocnemius and bicep femoris forces at 75%. Anterior cruciate ligament force reached its maximum of 343 N at 25% and decreased thereafter. Contact forces reached maximum of 1908 N, 2467 N and 2238 N at 5%, 25% and 75% periods respectively, with the medial compartment carrying a major portion of load and experiencing larger relative movements and cartilage strains. Contact pressures reached their peak on the medial plateau of 8.1 MPa and 7.5 MPa at 25% and 75% period, respectively. Much smaller contact stresses were computed at the patellofemoral joint. However, global optimization indicates that inclusion of the hip joint in the optimization along the knee and ankle joints only slightly (<10%) influences total forces in quadriceps, lateral hamstrings and medial hamstrings. As a consequence, even smaller differences are found in predicted ligament forces, contact forces/areas, and cartilage stresses/strains during the stance phase of gait. The distribution of total forces between the uni- and bi-articular muscle components in quadriceps and in lateral hamstrings, however, substantially alter at different stance phases.
In OA patients compared to normal subjects, muscle forces dropped nearly at all stance periods except the mid-stance. Force in the anterior cruciate ligament remained overall the same. Total contact forces-stresses overall deceased by about 25%. Alterations in properties due to OA had negligible effects on muscle forces but increased contact areas and cartilage strains and reduced contact pressures. For example, the average contact pressure noticeably dropped from 2.5 MPa to 1.3 MPa at 5% stance. Reductions in contact stresses as well as increases in tissue strains and transfer of load via menisci are partly due to the altered kinetics-kinematics of gait and partly due to deteriorations in cartilage-menisci properties in OA patients.
Changes in the knee adduction rotation of ±1.5° or the knee reference adduction moment of ±50% substantially affect the knee joint passive and active response at mid-stance of gait. Quadriceps and hamstrings forces substantially increased as adduction rotation dropped and diminished as adduction rotation increased and followed the trend in external adduction moment. Tibial contact forces remained larger always on the medial plateau. The ratio of the contact forces on the medial plateau to that on the lateral plateau was found unaffected by changes in moments but substantially increased from 8.8 to 90 with greater adduction rotation and diminished with smaller adduction rotation yielding a more uniform distribution. If the aim is to diminish the medial contact force irrespective of the lateral load, a drop in adduction rotation is much more effective than reducing the adduction moment. Substantial role of changes in adduction rotation is due to the associated alterations in joint nonlinear passive resistance. These findings explain the poor correlation between knee adduction moment and tibiofemoral compartment loading during gait suggesting that the internal load partitioning is dictated by the joint adduction rotation.
The effect of different gastrocnemius activation levels on the knee joint biomechanics in general and ACL forces in particular was investigated. In the lower extremity model in gait at 75% stance period, changes in gastrocnemius activity by +36% or -26% primarily altered forces in hamstrings with little effects on quadriceps. Gastrocnemius acted as ACL antagonist by substantially increasing its force. Simulations under isolated contraction of gastrocnemius confirmed these findings at all flexion angles. In particular, ACL force (anteromedial bundle) substantially increased with gastrocnemius activity at larger knee flexion angles. While hamstrings and gastrocnemius are both knee joint flexors, they play opposite roles in respectively protecting or loading ACL. Although the quadriceps is also recognized as antagonist of ACL, at larger joint flexion and in contrast to quadriceps, activity in gastrocnemius substantially increased ACL forces. The fact that gastrocnemius is an antagonist of ACL should help in effective prevention of ACL injuries, coping with an ACL injury and post ACL reconstruction periods.
To our knowledge no previous study investigated the detailed knee joint passive-active response in gait. Novel iterative kinematics-driven FE model that accounts for the synergy between passive structures and active musculature of the knee joint was used to determine muscle forces and tissue stresses/strains during the gait. The predictions on joint kinematics, ligament forces and contact areas/pressures were in good agreement with reported results in the literature. The current predictions have important implications in proper evaluation and treatment of knee joint disorders in order to not only prevent further injuries and degenerations but to regain a nearnormal function of the entire joint.